Edgar Degas "Femme se coiffant, la lettre" 1888/1892 collection privée
La peinture permet d’interpréter, d’imaginer, de rêver, de
laisser libre cours à ses émotions qui ne sont jamais que le reflet de ce qui
nous charme, hante ou bouleverse à un moment précis, celui où notre regard fait
cette traversée du miroir par tableau interposé.
Le thème de la lettre m’est cher...
Mais qu’est-ce une lettre ?
C’est d’abord un geste, la main qui glisse sur du papier, la plume qui
griffonne un morceau de vie
pour une autre personne, une pensée pour l’autre,
un autre visage de ce que nous sommes.
Elle est un signe, l’inscription de la
vie qui passe, d’un état d’âme, elle est une sorte de poésie instantanée, une
histoire du temps qui parle de la minute précise où elle s’écrit.
Elle est du
temps que l’on essaie de sauver, elle est une victoire sur le temps, ces minutes
qu’il a fallu pour écrire, pour lire et relire.
Elle s’écrit pour dire à l’autre qu’il est là malgré la distance et le temps,
pour que cette absence ne soit plus une absence, pour dire ce que le monde
n’est pas, n’est plus sans lui.
Elle est le récit d’une histoire, une trace d’encre sur le papier, la preuve de
notre acharnement, elle vient modifier l’ordre du monde et des choses.
Prendre le temps d’écrire une lettre, c’est la victoire du langage, un outil
privilégié, un lieu de partage, l'intimité et la solidarité se rejoignent,
c'est un geste aux conséquences parfois imprévisibles, parce qu'il y a cette
question:
jusqu'où pourrais-je aller, jusqu'où pourrons-nous aller, jusqu'où
cela nous mènera-t-il ?