J’aimerais
encore écrire, insouciante du temps qui passe, espiègle croquant la vie avec
gourmandise.
J’aimerais encore écrire le souffle de la liberté, du plaisir, de la
spontanéité, la surprise, l’insouciance, l’émerveillement.
J’aimerais encore écrire la douce nostalgie qui ouvre une fenêtre sur l’avenir,
comme un feu de cheminée qui crépite et rend la morsure de l’hiver savoureuse.
J’aimerais encore écrire en laissant envahir la page d’une encre qui vienne de
l’âme, en abolissant tout jugement critique.
J’aimerais encore écrire un conte extasié, un poème sans structure, sans rimes,
sans autre histoire que le plaisir de s’y abandonner.
J’aimerais encore décrire, l’arc en ciel, la mer, le vol d’un oiseau, mes îles,
l'amour, en m’abandonnant dans les couleurs du ciel.
J’aimerais encore décrire un orage lointain et inoffensif qui disparaît en
laissant sa douce et fraîche empreinte dans la mémoire.
J’aimerais encore décrire ce parfum qui me ramène à ce souvenir
intime, qui me fait du bien, mais s’échappe toujours lorsque je tente de le
saisir, de lui approprier la bonne étiquette, celle qui le rendrait accessible
à souhait.
Je ne sais plus qu’écrire mes sentiments à la dérive, l’avenir en butte avec
demain.
J'aimerais tant...
"Ecrire c'est dessiner une porte sur un mur infranchissable, et puis l'ouvrir."
Christian Bobin, L'homme-joie