Il faisait chaud et lourd dans ce musée noir de monde. Il commençait à fatiguer et se demandait ce qu’il était venu chercher là, un soir de nuit des musées. L’ambiance cependant était féerique, de ci de là des bougies flottaient dans des vasques et conféraient une ambiance irréelle dans cet ancien lieu conventuel à l’architecture gothique splendide. Mais il était ailleurs, visitait un autre musée non pas imaginaire mais là où il avait envie d’être en ce moment précis.
Il se mit à rêver, lui l’homme passionné, historien d’art, de jolies femmes.
Viendrait-elle comme il le lui avait suggéré ce matin, voulant laisser la surprise entière de la découverte elle qu'il n'avait jamais vue. Cela lui semblait amusant de deviner qui elle pourrait bien être, saurait-il la reconnaître ?
Au détour d’une allée il sentit une présence, un parfum.
Une femme regardait avec admiration et intérêt une toile de Staël '"Le portrait d'Anne",
elle devisait avec ses amis sur un ton léger et enjoué , bulle irisée soustraite au monde, au temps, au doute. Elle fit quelques pas vers le tableau suivant, il alla à sa rencontre, s’approcha, son regard croisa le sien ils se sourirent, séquence au ralenti tant la réalité dépasse souvent les rêves les plus fous.
Elle était donc venue !
La page encore blanche de leur histoire , un signe, une appartenance, un partage, un sens de la joie s'écrivait.
Nicolas de Staël "Portrait d'Anne" 1953 Musée Unterlinden Colmar