Surnaturelle, lumineuse, impalpable, nue et pure, la vision flottait sur la pierre, palpitait moelleusement. Il fixait les yeux sur elle et pourtant il craignait déjà que la caresse de son regard ne fît évaporer dans l'air cette hallucination faible.
Louÿs, Aphrodite, 1896, p. 99.
Ce qui vous rendit visible à mes yeux, fut justement cet ajournement infinitésimale que constituait le temps mis par mon regard pour venir se poser sur le bord de vos phrases. Le temps de l'adoucissement, du polissage des pierres - la distance réelle entre vos textes et notre éventuelle rencontre (la friction des peaux), importait peu. Des instants si fragiles que vouloir les brusquer d'un regard trop appuyé risquait d'en brouiller le sens.
Je tenais vos mots pour précieux talismans dans lesquels je plongeais des mains fiévreuses, choisissais au hasard, bien que je les savais tous, pour les faire retomber en bribes redécouvertes sur mes rêves éveillés.
Je ne pouvais vous aborder plus aveuglément qu'en vous lisant.
A.
A.
Une de ces pépites découverte au hasard d'une lecture chez " Ajournement des possibles"
Mots qui donnent l'étrange sensation d'avoir été écrits pour soi...
Hallucination !
crédit photo:
Statue d'Aphrodite dite Vénus d'Arles.
Fin du 1er siècle avant J.-C. d'après un original de Praxitèle créé vers 350 avant J.-C.
Paris Musée du Louvre