[...]Une fois de plus, j'ai côtoyé une vérité que je n'ai pas comprise.
Je me suis cru perdu, j'ai cru toucher le fond du désespoir et,
une fois le renoncement accepté, j'ai connu la paix.
Il semble à ces heures-là que l'on se découvre soi-même
et que l'on devienne son propre ami.
Plus rien ne saurait prévaloir contre un sentiment de plénitude qui satisfait en nous
je ne sais quel besoin essentiel que nous ne connaissions pas[...]
[...]L'essentiel, nous ne savons pas le prévoir[...]
[...]Que savons-nous, sinon qu'il est des conditions inconnues qui nous fertilisent ?
Où loge la vérité de l'homme ?
La vérité, ce n'est point ce qui se démontre. Si dans ce terrain, et non dans un autre,
les orangers développent de solides racines, et se chargent de fruits,
ce terrain-là c'est la vérité des orangers.
Si cette religion, si cette culture, si cette échelle des valeurs,
si cette forme d'activité et non telles autres, favorisent chez l'homme cette plénitude, délivrent en lui un grand seigneur qui s'ignorait, c'est que cette échelle des valeurs,
cette culture, cette forme d'activité, sont la vérité de l'homme.
La logique ?
Qu'elle se débrouille pour rendre compte de la vie[...]
Antoine de Saint-Exupéry , in Terre des hommes
p, 158/159 folio 21