Aux nénuphars de l’onde…
la pucelle doucement se peigne au soleil.
Aux nénuphars de l'onde elle donne un orteil
Ultime, et pour tiédir ses froides mains errantes
Parfois trempe au couchant leurs roses transparentes.
Tantôt, si d'une ondée innocente, sa peau
Frisonne, c'est le dire absurde d'un pipeau,
Flûte dont le coupable aux dents de pierrerie
Tire un futile vent d'ombre et de rêverie
Par l'occulte baiser qu'il risque sous les fleurs.
Mais presque indifférente aux feintes de ces pleurs,
Ni se divinisant par aucune parole
De rose, elle démêle une lourde auréole;
Et tirant de sa nuque un plaisir qui la tord,
Ses poings délicieux pressent la touffe d'or
Dont la lumière coule entre ses doigts limpides !
...Une feuille meurt sur ses épaules humides,
Une goutte tombe de la flûte sur l'eau,
Et le pied pur s'épeure comme un bel oiseau
Ivre d'ombre...
Paul Valéry , Episode
Poésie Gallimard
crédit photo liliroze
Raisonnable… ?
comme poissons dans l'eau,
et nous ne percevons jamais que par un accident
tout ce que contient de stupidités l'existence d'une personne raisonnable.
Nous ne pensons jamais que ce que nous pensons
nous cache ce que nous sommes.
Paul Valéry
Monsieur Teste page 39
L'imaginaire/Gallimard
tableau François Groslière "Bouche cousue"
Tendresse…
La quantité de tendresse à ressentir,
à exprimer en un jour,
est limitée.
Paul Valéry in, Tel Quel, suite, Folio essais
crédit photo, Altphotos
Questions…
Paul Klee Senecio 1922
Les plus "profondes" questions du monde:- Comment n'as-tu pas pensé à cela ?
- Et toi, comment y as-tu pensé ?
Paul Valéry
(Mélange, p.307, in Oeuvre t.1, La Pléiade)
Combien de fois me suis-je dit, pourquoi n'y ai-je pas pensé ? Et tout à coup tout s'éclaire car c'était justement à cela que j'aurais dû penser en évoquant telle situation ou telle chose.