Ca venait avec les beaux jours, et puis un jour on y était. Les grandes
vacances, celles dont on ne voyait pas le bout. Soudain la liberté. Le seul
devoir de vacances : partir.
On allait au bord de la mer,avec Michel Jonaz on suçait des glaces à l’eau, on regardait les
bateaux...
On n’appelait pas ça non plus l’enfance,
on n’appelait pas ça l’ennui. On n’en parlait pas beaucoup de l’été. On le
laissait passer comme on pouvait. Ca ressemblait un peu à l’éternité, tous les
jours la même chose, et puis tout de même la splendeur de la mer, sa présence
massive, l’infini réel.
L’horizon te regarde. Et la mer te guette doublement,
au loin et en profondeur. Ce qui arrive au temps, sur une plage, c’est aussi un
coup de soleil. L'abolition de toute pensée, une mise en veille de la conscience bercée par le
sac et le ressac, sans buts autres que la bronzette,le sérieux des jeux de plage où l’on ne compte pas les points. Le livre qu’on
mettra tout l’été à lire. La nage qui ne sert qu’à faire trempette. L’été réel, celui où il ne se passe rien.
Une plage de temps infinie, où rien n’est
terni par un but. Rien d’autre que rien à faire.
Et tout le reste presque une
faute de goût.
L’été comme un jour sans fin. L’été qui nous rappelle sans jamais le dire, que la fin aura ce goût,
et que
tout le reste n’est que remplissage, distraction, divertissement.
L’été nous relie mystérieusement à tous nos étés passés et semble dire : « Mais
qu’as-tu fait de ton année ? »
Comme si ce temps d’inaction était notre seule chance de pleine
conscience, quand nous percevons hors de tout but, percevons enfin pour
percevoir, le monde se donne à nous d’une manière que l’on pourrait dire
artiste. Les choses ne sont plus simplement utiles, elles se mettent à valoir
pour elles-mêmes.
Voilà, c’est l’été, il nous reste encore quelques jours avant la rentrée.
Il n’y a plus rien à
faire, qu’à regarder la lumière sur les vagues, écouter le vent !
« Quoi, n’avez-vous pas vécu ? C’est non seulement la plus fondamentale mais la plus illustre de vos occupations. » (Montaigne Essais III, 13)
texte librement inspiré d'une lecture d'Ollivier Pourriol