Elise que ces vieux murs ne peuvent pas s'approprier,
fontaine où se mire ma monarchie solitaire, comment
pourrais-je jamais vous oublier puisque je n'ai pas à me
souvenir de vous: vous êtes le présent qui s'accumule.
Nous nous unirons sans avoir à nous aborder, à nous prévoir,
comme deux pavots font en amour une anémone géante.
Je n'entrerai pas dans votre coeur pour limiter sa mémoire.
Je ne retiendrai pas votre bouche pour l'empêcher de
s'entrouvrir sur le bleu de l'air et la soif de partir.
Je veux être pour vous la liberté et le vent de la vie qui
passe le seuil de toujours avant que la nuit ne devienne
introuvable.
René Char
Revue" Les deux soeurs" mai 1947
Elise qui deviendra Marthe dans Le Poème pulvérisé.
Char
dans l'atelier du poète
Edition établie par Marie-Claude Char
Quarto Gallimard
photo Eveline Gallet
Ce livre un cadeau reçu à Noël...que je savoure !
Trajet de vie dans le foyer incandescent de la poésie,une histoire des poèmes à laquelle s'enchevêtre la vie du poète. A cet "artisanat furieux" de celui qui oeuvre dans son atelier se joignent les peintres, envol des mots au bout du pinceau où l'écriture devient palette, recueils illustrés, échanges de correspondance avec les philosophes, les poètes, les écrivains, autant de traces qui soulignent l'échange des créateurs dans leur atelier.